à la nature que l’être servi ; or tous les individus
étant égaux aux yeux de la nature, cette
prédilection est impossible ; donc l’action qui
sert l’un, en nuisant à l’autre est d’une indifférence
parfaite à la nature.
Mais si l’action nuisoit à une très-grande quantité d’individus, et qu’elle ne nous rapportât à nous, qu’une très-légere dose de plaisir, ne seroit-il pas affreux de s’y livrer alors ?
Pas d’avantage, parce qu’il n’y a aucune comparaison entre ce qu’éprouvent les autres et ce que nous ressentons ; la plus forte dose de douleur chez les autres doit assurément être nulle pour nous, et le plus léger chatouillement de plaisir, éprouvé par nous, nous touche ; donc nous devons à tel prix que ce soit, préférer ce léger chatouillement qui nous délecte, à cette somme immense des malheurs d’autrui, qui ne sauroit nous atteindre ; mais s’il arrive au contraire que la singularité de nos organes, une