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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/136

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pas volontiers des doigts ny de la main, pour la mauuaise odeur qu’il y imprimoit et laissoit par plusieurs iours : aussi ne m’en presenterent-ils plus lors qu’ils eurent recogneu le degoust que i’en auois. Ils font aussi pitance de glands, qu’ils font bouillir en plusieurs eauës pour en oster l’amertume, et les trouuois assez bons : ils mangent aussi d’aucunes fois d’vne certaine escorce de bois cruë, semblable au saulx, de laquelle i’ay mangé à l’imitation des Sauuages ; mais pour des herbes ils n’en mangent point du tout, ny cuites ny cruës, sinon de certaines racines qu’ils appellent Sondhratatte, et autres semblables.

Auparauant l’arriuée des François au pays des Canadiens, et des autres peu-142||ples errans, tout leur meuble n’estoit que de bois, d’escorces ou de pierres ; de ces pierres ils en faisoient des haches et cousteaux, et du bois et de l’escorce ils en fabriquoient toutes les autres vstensiles et pieces de mesnage, et mesme les chaudieres, bacs ou auges à faire cuire leur viande, laquelle ils faisoient cuire, ou plustost mortifier en cette maniere.

Ils faisoient chauffer et rougir quantité de graiz et cailloux dans vn bon feu, puis les iettoient dans la chaudiere pleine d’eau, en laquelle estoit la viande ou le poisson à cuire, et à mesme temps les en retiraient et en remettoient d’autres en leur place, et à succession de temps l’eauë s’eschauffoit, et cuisoit ainsi aucunement la viande. Mais pour nos Hurons, et autres peuples et nations Sedentaires, ils auoient (comme ils ont encore) l’vsage et l’industrie de faire des pots de terre, qu’ils cuisent en leur foyer, et sont forts bons, et ne se cassent point au feu, encore