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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/153

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mary ||165 se contentant de dire à ses parens et à elle, qu’elle ne vaut rien, et qu’elle se pouruoye ailleurs, et dés lors elle vit en commun auec les autres, iusqu’à ce que quelqu’autre la recherche ; et non seulement les hommes procurent ce diuorce, quand les femmes leur en ont donné quelque suiet ; mais aussi les femmes quittent facilement leurs marys, quand ils ne leur agreent point : d’où il arriue souuent que telle passe ainsi sa ieunesse, qui aura eu plus de douze ou quinze marys, tous lesquels ne sont pas neantmoins seuls en la iouyssance de la femme, quelques mariez qu’ils soient : car la nuict venue les ieunes femmes et filles courent d’vne Cabane à autre, comme font, en cas pareil, les ieunes hommes de leur costé, qui en prennent par où bon leur semble, sans aucune violence toutefois, remettant le tout à la volonté de la femme. Le mary fera le semblable à sa voysine, et la femme à son voysin, aucune jalousie ne se mesle entr’eux pour cela, et n’en reçoiuent aucune honte, infamie ou des-honneur.

Mais lorsqu’ils ont des enfans procreez de leur mariage, ils se separent et quittent rarement, et que ce ne soit pour vn grand ||166 suiet, et lors que cela arriue, ils ne laissent pas de se remarier à d’autres, nonobstant leurs enfans, desquels ils font accord à qui les aura, et demeurent d’ordinaire au pere, comme i’ay veu à quelques-vns, excepté à vne ieune femme, à laquelle le mary laissa vn petit fils au maillot, et ne sçay s’il ne l’eust point encore retiré à soy, apres estre sevré, si leur mariage ne se fust r’accommodé, duquel nous fusmes les intercesseurs pour les remettre ensemble et apaiser leur debat, et firent à la fin ce