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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/188

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uant, et se mettre en sauueté, ce qui a réussi à plusieurs : ie me persuade et crois 215|| que c’est en partie pourquoy ils portent ordinairement tous leurs plus beaux colliers et matachias en guerre.

Lorsqu’ils ioignent vn ennemy, et qu’ils n’ont qu’à mettre la main dessus, comme nous disons entre-nous : Rends-toy, eux disent Sakien, c’est-à-dire, assied-toy, ce qu’il faict, s’il n’ayme mieux se faire assommer sur la place, ou se deffendre iusqu’à la mort, ce qu’ils ne font pas souuent en ces extremitez, sous esperance de se sauuer, et d’eschapper avec le temps par quelque ruze. Or comme il y a de l’ambition à qui aura des prisonniers, cette mesme ambition ou l’enuie est aussi cause quelques-fois que ces prisonniers se mettent en liberté et se sauuent, comme l’exemple suyuant le monstre.

Deux ou trois Hurons se voulans attribuer chacun un prisonnier Yroquois, et ne se pouuans accorder, ils en firent iuge leur propre prisonnier, lequel bien aduisé se seruit de l’occasion et dit : Vn tel m’a pris, et suis son prisonnier, ce qu’il disoit contre la vérité et exprez, pour donner un iuste mescontentement à celuy de qui il estoit vray prisonnier : et de faict indigné qu’vn autre auroit iniustement l’honneur 216|| qui luy estoit deu, parla en secret la nuict suyuante au prisonnier, et luy dit : Tu t’es donné et adiugé à vn autre qu’à moy, qui t’auois pris, c’est pourquoy i’ayme mieux te donner liberté, qu’il aye l’honneur qui m’est deu, et ainsi le deslians le fit euader et fuyr secrettement.

Arriuez que sont les prisonniers en leur ville ou village, ils leur font endurer plusieurs et diuers tour-