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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/221

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et s’embarquer : car en peu de temps les vents cesseront, et la mer calmera : aussi-tost dit, aussi-tost faict, ma voix se porte par toutes les Cabanes de l’Isle, qu’il falloit s’embarquer, et que ie les auois asseurez de la bonace prochaine. Ce qui les fist tellement diligenter, qu’ils nous deuancerent tous, et fusmes les derniers à desmarer. À peine les Canots furent-ils en mer, que les vents cesserent, et la mer calma comme vn plancher, iusques à nostre desembarquement et arriuée à nostre ville de Quieunonascaran.

Le soir que nous arriuasmes au port de cette ville, il estoit pres de trois quarts d’heure de nuict, et faisoit fort obscur, c’est pourquoy mes Sauuages y cabanerent : mais pour moy i’aimay mieux m’en aller seul au trauers des champs et des bois en nostre Cabane, qui en estoit à demye lieuë loin, pour y voir promptement mes Confreres, de la santé desquels 263||les Sauuages m’auoient faict fort douter : mais ie les trouuay en très-bonne disposition, Dieu mercy, de quoy ie fus fort consolé, et eux au reciproque furent fort ayses de mon retour et de ma santé, et me firent festin de trois petites Citrouilles cuittes sous la cendre chaude, et d’vne bonne Sagamité, que ie mangeay d’vn grand appetit, pour n’auoir pris de toute la iournée qu’vn bien peu de bouillon fort clair, le matin auant partir.