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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/234

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temps, chantans doucement (ces mots :) Vn tel m’a donné cecy, vn tel m’a donné cela, et telles et semblables paroles en la louange de ceux qui leur ont donné, et en beaucoup de mesnages on leur offre librement : qui vn cousteau, qui vn petunoir, qui vn chien, qui vne peau, vn canot, ou281||autre chose, qu’ils prennent sans en faire autre semblant, iusques à ce qu’on vient à leur donner la chose qu’ils auoient songée, et celuy qui la reçoit fait alors vn cry en signe de joye, et s’encourt en grand’ haste de la Cabane, et tous ceux du logis en luy congratulant, font vn long frappement de mains contre terre, auec cette exclamation ordinaire, hé é é é é, et ce present est pour luy : mais pour les autres choses qu’il a euës, et qui ne sont point de songe, il les doit rendre apres la feste, à ceux qui les luy ont baillées. Mais s’ils voyent qu’on ne leur donne rien ils se faschent, et prendra tel humeur à l’vn d’eux, qu’il sortira hors la porte, prendra vne pierre, et la mettra auprès de celuy ou celle qui ne luy aura rien donné, et sans dire mot s’en retournera chantant, qui est vne marque d’iniure, reproche et de mauuaise volonté.

Cette feste dure ordinairement trois iours entiers, et ceux qui pendant ce temps-là n’ont peu trouuer ce qu’ils auoient songé, s’en affligent, s’en estiment misérables, et croyent qu’ils mourront bien-tost. Il y a mesme des pauures malades qui s’y font porter, sous espérance d’y rencontrer282||leur songe, et par consequent leur santé et guerison.