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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/276

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cune apparence, non plus que de certitude qu’ils deussent descendre iusques là. Ie parlay donc à vn Capitaine de guerre, nommé Angoiraste, et à deux autres Sauuages de sa bande : l’vn nommé Andatayon, et l’autre Conchionet, qui me promirent place dans leur Canot : le conseil s’assemble là-dessus, non en vne Cabane, ains dehors sur l’herbe verte, où ie fus mandé, et supplié par ces Messieurs de leur estre fauorable enuers les Capitaines de la traicte, et de faire en sorte qu’ils peussent avoir d’eux les marchandises nécessaires à prix raisonnable, et que de leur costé ils leur rendroient de tres-bonnes pelleteries en eschange. De plus, qu’ils desiroient fort se conseruer l’amitié des François, et qu’ils esperoient de moy vn honneste recit du charitable accueil et bon traictement que nous auions receu d’eux. Ie leur promis là-dessus tout ce que ie deuois et pouuois, et ne manquay point de les contenter et assister en338||tout ce qu’il me fut possible (aussi le deuois-je faire) : car de vray, nous auious trouué et experimenté en aucun d’eux autant de courtoisie et d’humanité que nous eussions peu esperer de quelques bons Chrestiens, et peut-estre le faisoient-ils neantmoins sous esperance de quelque petit present, ou pour nous obliger de ne les point abandonner : car la bonne opinion qu’ils auoient conceuë de nous leur faisoit croire que nostre presence, nos prieres et nos conseils leur estoient vtils et necessaires.

Faisant mes adieux par le bourg, plusieurs se doutans que ie ne retournerois point de ce voyage, en tesmoignoient estre mal contens, et me disoient d’vne voix assez triste : Gabriel, serons-nous encore