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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/293

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tout le Canada : à quelques heures de là, vn François, nommé la Montagne, auec ses Sauuages, se penserent perdre, et tomber dans vn precipice et cheute d’eau, de laquelle ils ne fussent iamais sortis que morts et tous brisez, et leur faute estoit, en ce362||qu’ils n’auoient pas assez-tost pris terre.

Nous auons faict mention de plusieurs cheutes d’eau, et de quantité de sauts et de precipices dangereux : mais voicy le saut de la Chaudière que nous allons presentement trouuer, le plus admirable, le plus dangereux et le plus espouuentable de tous : car il est large de plus d’vn grand quart de lieuë et demy, il a au trauuers quantité de petites Isles qui ne sont que rochers aspres et difficiles, couuertes en partie de meschants petits bois, le tout entre-coupé de concauitez et precipices, que ces bouillons et cheutes d’eau de six ou sept brasses, ont faict à succession de temps, et particulierement à vn certain endroict, où l’eau tombe de telle impetuosité sur vn rocher au milieu de la riuiere, qu’il s’y est caué vn large et profond bassin : si bien que l’eau courant là dedans circulairement, y faict de tres-puissans bouillons, qui produisent des grandes fumées du poudrin de l’eau qui s’esleuent en l’air. (Il y a encor’ vn autre semblable bassin ou chaudiere plus à l’autre bord de la riuiere, qui est presque aussi impetueux et furieux que le premier, et rend de mesmes ses eauës en des grands precipices :)363||et c’est la raison pourquoy nos Montagnets et Canadiens ont donné à ce saut le nom Asticou, et les Hurons Anoò, qui veut dire chaudiere en l’vne et en l’autre langue. Cette cheute d’eau meine vn tel bruit dans ce bassin, que l’on l’entend de