Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/40

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les grands hommes et sages d’Espagne, Druides és Gaules, couler dans les delices de l’Italie, pour y voir la politesse, grandeur et gentillesse de l’Empire Romain, de là se couler dans la Grèce, puis passer l’Elespont, pour voir les richesses d’Asie ; et enfin penetrant les Perses, surmontant le Caucase, passant par les Albaniens, Scythes, Massagettes : bref, après auoir couru les puissans Royaumes de l’Inde, trauersé le grand fleuue Phison, arriua enfin vers les Brachmanes, pour ouyr ce grand Hyarcas philosopher de la nature et du mouuement des astres : et comme insatiable de sçauoir, après auoir couru toutes les Prouinces où il pensa apprendre quelque chose d’excellent, pour se rendre plus diuin parmy les hommes ; de tous ses grands trauaux ne laissa rien de memorable qu’vn chetif liure, contenant les dogmes des Pytagori- 2|| ciens, fagoté, poly, doré, qu’il feignoit auoir appris dans l’Antre trophonine, qui fut receu auec tant d’applaudissement des Anciates, que pour eternizer sa memoire ils le consacrerent au plus haut faite de leur plus magnifique Temple.

Ce grand homme, qui auoit acquis par ses voyages tant de suffisance et d’experience, que les Princes, et entr’autres l’Empereur Vespasien, estimoient son amitié de telle sorte, que, soit que, ou par vanité, ou à bon escient, qu’il désira se seruir de luy en la conduite de son grand Empire, il le conuia de s’en venir à Rome auec ses attrayantes paroles, qu’il luy feroit part de tout ce qu’il possedoit, sans en exclure l’Empire, pour monstrer l’estime qu’il faisoit de ce grand personnage ; neantmoins il croyoit n’auoir rien remarqué digne de tant de trauail, puis qu’il n’auoit pu rencontrer vne