Page:Saint-Amant - Œuvres complètes, Livet, 1855, volume 1.djvu/367

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Les plus beaux sens, les termes les plus forts,
Tous eshanchez, rampant à demy morts,
Et le caprice avecques sa peinture,
Qui fait bouquer[1] et l’Art et la Nature,
Ce fou divin, riche en inventions,
Bizarre en mots, vif des descriptions,
Ce rare autheur des nobles balivernes,
Quoy qu’inspiré du demon des tavernes,
N’ose parestre et n’a plus de credit
Depuis qu’en cour vostre honneur reverdit.


    Victor et Brodeau, c’est tout un. — Victor Brodeau étoit de Tours. On a de lui un poème intitulé les Louanges de J.-C., Lyon, in-8, Sulpice Sabon et Ant. Constantin, 1540. Le début n’a rien d’équivoqué :

    Verbe eternel dès le commencement,
    Mis en secret dedans le pensement
    Du Dieu puissant…

    prises à la fin du vers suivent dans un sens différent, souvent avec une orthographe tout autre. » — Crétin s’est distingué dans ce genre de rime, lui dont Marot a dit :

    Le bon Crétin au vers équivoqué.

    Voici, du bon Crétin, quelques vers pour exemple :

    Grande et petit : sautereaux, sauterelles.
    Ont de plaisir et liesse abondance :
    On chante, on rit ; qui le corps a bon danse ;
    Et pour montrer qu’il ne leur chaille mie
    Des maux passés, l’un prend sa chalemie (chalumeau),
    L’autre un tabour, l’autre une cornemuse ;
    Celuy n’y a qui en son cor ne muse.

    On connoît en ce genre les vers de Marot : en rime — m’enrime ; rimailleurs — rime ailleurs ; rimassez — rime assez ; ma rimaille — marri, maille, etc.

  1. Se dit des choses qu’on est contraint de faire par la violence. (Furetière.)