Page:Saint-Amant - 1907.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bénéficier, le Moïse n’est pas ennuyeux. M. Faguet l’a reconnu sans honte ; je l’ai éprouvé moi-même. Quand on a l’habitude des lectures littéraires, on peut lire le Moïse sauvé ; s’il contient des passages un peu ardus, il en contient beaucoup d’autres ou gracieux, ou pittoresques, ou brillants, ou même tout à fait beaux. C’est, en somme, le plus grand effort poétique, de Ronsard à Victor Hugo, et qui n’a pas été tout à fait vain. Le Moïse a surtout une valeur de poésie picturale : c’est une curieuse fresque ; plusieurs parties en sont embues, sans doute, mais cela tient plutôt à l’humidité des murs qu’à l’inhabileté de l’artiste.

Le Moïse a-t-il été connu des premiers romantiques ? Théophile Gautier a l’air de l’insinuer. Nodier, Vigny, Musset n’auraient pas dédaigné d’y prendre quelques thèmes, mais ceci exigerait des enquêtes attentives. On peut du moins lire parallèlement le Bain de la princesse(1) et le Bain de Suzanne, de Vigny. L’avantage reste au vieux poète pour l’imagination, la grâce du détail, la délicatesse et surtout la couleur. Est-ce que le romantisme ver-


(1) Voyez page 214.