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2 28 SAINT-AMANT

ne suis pas si sévère à ma réputaliou que je ne la veuille faire vivre qu’après ma mort. C’est une phi- losophie un peu trop scrupuleuse, et que pas un de tous ceux qui nous la prêchent ne voudrait observer, s’il avait fait quelque chose qui méritât de voir le jour. La louange qu’on nous donne quand nous ne sommes plus au monde nous est fort inutile, puisque nous ne nous en soucions plus ; au contraire, quand nous y sommes, le blâme nous peut servir à l’amen- dement : de sorte que, si l’on fait bien, il est très raisonnable qu’on en reçoive le salaire durant la vie, et si l’on fait mal, on est encore en état de s’en corri- ger. Quelques-uns, poussés d’une humeur si jalouse du contentement d’autrui qu’ils voudraient que le soleil n’éclairât que pour eux, ont tâché de me dis- suader de ce dessein, m’alléguant que les choses, pour excellentes qu’elles puissent être, deviennent presque méprisables depuis qu’on les rend commu- nes ; mais quand ils me montreront qu’on estime moins Ovide ou Horace (sans me comparer à eux) depuis qu’ils ont été imprimés qu’on ne faisait lors- qu’ils n’étaient écrits qu’à la main, je serai de leur avis. Après avoir assemblé toutes les pièces que j’a- vais composées, j’y ai remarqué une diversité qui, peut- être, ne sera pas trouvée désagréable ; et parti- culièrement j’ai pris quelque plaisir à de certains petits essais de poèmes héroïques, dont parmi les mo- dernes le Cavalier Marin* nous a donné les premiers