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Page:Saint-Amant - 1907.djvu/66

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Et, quoi qu’il peut souffrir, je crois que le silence
Aurait de son ardeur éteint la violence
Par le coup désiré d’une subite mort,
Avant qu’à son respect il eût fait tel effort.
Aussi nul n’en sut rien jusqu’à ce que les arbres
Et les endroits unis des plus solides marbres
L’offrirent à la vue, écrite de sa main,
À cette belle Nymphe au courage inhumain.

Elle s’en offensa. Dieux ! est-il bien croyable
Qu’une telle amitié lui fut désagréable ;
Qu’un orgueilleux dédain, comme absolu vainqueur,
Lui fit naître aussitôt la haine dans le cœur ;
Que ces chiffres d’amour si remplis de mystères
Ne furent à ces yeux que de vains caractères,
Et qu’elle les put lire avecque ce penser
De ne les plus revoir que pour les effacer !
Las ! il n’est que trop vrai, mais cette âme farouche
Ne s’en contenta pas ! il fallut que sa bouche,
S’accordant à son cœur, plus dur qu’un diamant,
En prononçât l’arrêt à ce fidèle amant.
Que ne lui dit-il point pour lui servir d’excuse !
Quelles vives couleurs n’employa point sa muse !…
Mais ses intentions, si justement conçues,
Quoi qu’il pût alléguer, ne furent point reçues.
Au contraire, on eût dit, à voir son fier maintien,
Qu’elle se déplaisait en ce doux entretien,
Ce qu’elle confirma par une prompte fuite.
De peur, comme je crois, qu’elle n’en fût séduite,