Page:Saint-Amant - 1907.djvu/68

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Te verrai-je toujours farouche
Errer dans ce bois écarté,
Que ton insensibilité
Pourrait accroître d’une souche ?
Hélas ! je ne puis plus courir.
Tant la douleur me rend débile ;
Insensible, sois immobile
Seulement pour me voir mourir.

Au moins déclare-moi, de grâce,
Qui te mène en ces sombres lieux,
Où le ciel avec tous ses yeux
Ne saurait voir ce qui s’y passe.
Est-ce pour cacher la splendeur
Des astres de ton beau visage,
Ou ne cherches-tu de l’ombrage
Que pour conserver ta froideur ?…

Hé ! ne crains-tu point la furie
De ces animaux enragés,
Qui tant de fois se sont chargés
De l’honneur de ma bergerie ?
Non, tu les verrais sans effroi,
Et leur irais faire la guerre,
Sachant bien qu’en toute la terre
Rien n’est cruel au prix de toi.

Fière Nymphe, qui fais trophée
D’un naturel sans amitié,