Page:Saint-Amant - 1907.djvu/92

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

     Tant de bons tours ne s’inventèrent,
Ni jamais l’Amour même et sa belle Psyché
     Tant de délices ne goûtèrent,
Que nos sens en goûtaient en ce plaisant péché.

     La langue, étant de la partie,
     Sitôt qu’un baiser l’assiégeait,
     Aux bords des lèvres se rangeait,
     Afin de faire une sortie ;
     L’ennemi, recevant ses coups,
     Souffrait un martyre si doux
     Qu’il en bénissait les atteintes ;
Et mille longs soupirs, servant en même temps
     De chants de victoire et de plaintes,
Montraient que les vaincus étaient les plus contents.

     Un jour, près d’une vive source
     D’argent liquide et transparent,
     Qui prend la fuite en s’égarant
     Vers la mer où finit sa course,
     Mon luth, parlant à basse voix,
     S’entretenait avec mes doigts
     De mes secrètes fantaisies,
Et parfois s’éclatant en la vigueur des sons,
     Les roches se sentaient saisies
Du mignard tremblement de mille doux frissons.

     Les oiseaux, tirés par l’oreille,
     Allongeant le col pour m’ouïr,