Aller au contenu

Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/377

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

J’ai vu le grand Henri ceint d’une écharpe aux trois couleurs ; les bons fédérés de province se décoiffaient devant lui ; on ne regardait pas les autres, mais on ne les insultait pas non plus.

La France vient enfin de décerner une statue à J.-J. Rousseau. Ah ! pourquoi ce grand homme est-il mort ?

CHAPITRE X.

CONCLUSIONS

J’ai fourni ma course et je me recueille avec moi-même pour moraliser les différents objets qui me sont passés sous la vue ; j’ai appelé l’Assemblée nationale un corps politique, cela convenait au sens dans lequel je parlais alors ; mais il est bon que j’achève de développer mes idées.

L’Assemblée nationale, uniquement législatrice, n’eut ni puissance législative, ni caractère représentatif, elle fut l’esprit du souverain, c’est-à-dire du peuple. Après qu’il eut secoué le joug, elle abdiqua les pouvoirs qu’elle avait reçus de la tyrannie, elle abdiqua même tous pouvoirs devenus injustes depuis que la nation s’était rendue libre. Il me semble voir Lycurgue, dont j’ai parlé ci-dessus, quitter l’empire et l’autorité pour porter des lois. Elle convertit le titre d’états généraux en celui d’Assemblée nationale : le premier signifiait un messa­ge, le second une mission ; elle ne l’exerça point comme Lycurgue, Mahomet et Jésus-Christ, au nom du ciel ; le ciel n’était plus dans le cœur des hommes, ils avaient besoin d’un autre appât plus conforme à l’intérêt humain. Comme la vertu est encore un prestige chez les mortels fiers et corrompus, que ce qui est bon y paraît beau, tout le monde s’enivra des droits de l’homme, et la philoso­phie et l’orgueil ne trouvèrent pas moins de prosélytes que les dieux immortels.

Cependant, sous la dénomination simple d’Assemblée nationale, le législa­teur, ne parlant aux hommes que d’eux-mêmes, les frappa d’un saint vertige et les rendit heureux. Toutefois, il n’usa jamais d’autorité directe sans