Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/378

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être coupable envers le souverain. Il ne faut du tonnerre qu’aux faux dieux, et quand la sagesse et le génie ne peuvent point suffire à ceux qui entre­prennent une législation, son règne sera court ou funeste. J’ai dit la prudence, la dextérité et la patience de l’Assemblée nationale, je ne me répéterai point ; elle modifia tout et on vit ne s’écarter de cette discipline que ceux qui la troublaient dans son sein par ignorance, folie ou séduction.

Oserai-je mettre sur le papier une réflexion que tout le monde a faite, c’est que la France vit bientôt des maîtres dans la personne de ses législateurs et perdit ainsi sa dignité. Si l’Assemblée nationale n’a point de projets éloignés, elle seule est vertueuse ou sage, elle n’a point voulu d’esclaves et a brisé les fers d’un peuple qui ne paraît fait que pour en changer. On n’omit rien pour lui prouver qu’on lui était assujetti ; on les qualifiait d’augustes représentants ; les officiers tyrannisant le peuple souverain, sous le nom de frères, pliaient devant les législateurs qu’ils ne devaient que respecter et qu’aimer. Lâches que vous étiez, vous les croyiez des rois, parce que votre faiblesse ne connais­sait que l’espé­rance ou la crainte.

L’Assemblée nationale ne fut point une législature ; cette institution ne commencera qu’après elle, c’est pourquoi sa mission n’est limitée que par la fin de son ouvrage. Aussi juste que profonde, elle obéit à ses propres décrets ; elle porta cette loi, qui ravit mon cœur et celui des hommes libres, que les prêtres qui se trouvaient dans l’assemblée enverraient aux municipalités de leur ressort l’acte de leur serment civique.

On me demandera si je pense sérieusement que la Constitution de France, telle qu’elle est, soit la volonté de tous ; je réponds catégoriquement que non ; parce qu’il est impossible que quand un peuple passe un contrat nouveau, alors que le premier est perdu et souillé, les fripons et les malheureux ne forment deux partis ; mais ce serait un étrange abus de la lettre, que de prendre la résistance de quelques scélérats pour une part de la volonté. Règle générale, toute volonté, même souveraine, inclinée vers la