pour le salut public. On ne pouvait point vous juger alors ; mais en étiez-vous moins coupable, et votre puissance n’avait-elle pas à rendre compte aussitôt que votre perfidie en serait dépouillée ?
Je pardonnerais à l’habitude de régner, à l’incertitude, à la terreur des premiers orages, la dissimulation employée pour conserver des droits affreux, chers encore à une âme sans pitié ; mais ensuite, lorsque l’Assemblée nationale eut fait des réformes utiles, lorsqu’elle présenta les Droits de l’Homme à la sanction du roi, quelle défiance injuste, ou plutôt quel motif, si ce n’est la soif de régner, si ce n’est l’horreur de la félicité publique entrava les représentants du peuple ? Celui-là qui disait : Mon peuple, mes enfants ; celui-là qui disait ne respirer que pour le bonheur de la nation, qui disait n’être heureux que de son bonheur, malheureux que de ses maux ; celui-là lui refusais ses droits les plus sacrés, balançait entre le peuple et son orgueil, et voulait la prospérité publique, sans vouloir ce qui la constitue. Louis pleurait : était-ce fureur ou tendresse ? On connaît une âme amollie par la crainte et la cruauté ; tel fut Louis XVI invoquant le ciel quand il allait verser le sang ; mais le premier sous le soleil, depuis que l’histoire a transmis les événements, le système de la tyrannie du roi fut la douceur et l’apparence de la bonté ; partout il se mettait a la place de la patrie, et cherchait à séduire les affections qu’on ne doit qu’à elle ; piège d’autant plus délicat, que, se joignant à la violence cachée et à l’intrigue, Louis sapait les lois, et par la force et par le raffinement de sa conduite, et par l’intérêt de la vertu malheureuse.
Ces larmes ne sont point perdues, elles coulent encore sur le cœur de tous les Français ; ils ne conçoivent pas cette déloyauté ; ils ont aimé longtemps Louis, qui méditait leur esclavage. Le malheureux a fait depuis tuer ceux qui l’aimaient alors !
Combien n’a-t-il pas fallu d’attentats pour les détromper ! Ni la fuite du roi, ni sa protestation, par laquelle il immolait la liberté, ni le refus de se rendre à l’autel de la Fédération, où la patrie l’appelait pour le presser sur son cœur,