Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/287

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est fort rare de trouver entre deux personnes les rapports qui étoient entre eux : ils avoient le même degré de sensibilité, les mêmes goûts, les mêmes opinions.

Peu de tems après le souper, mes hôtes me conduisirent à ma chambre ; Philips me fit remarquer la beauté de la nuit, l’or étincelant des astres, le silence de ce moment où la nature commande le repos. Sara ne manqua pas d’aller voir ses enfants ; Philips donna ses ordres, fit la visite de ses écuries, & le couple heureux alla partager un assez bon lit.

J’eus quelque peine à m’endormir : tout ce que je venois de voir me paroissoit un songe ; mais c’étoit un songe que j’aurois voulu faire durer toute ma vie.

Je m’éveillai assez matin ; mais je ne me serois point du tout pressé de partir : j’adorois mes hôtes ; leur demeure, leur genre de vie, l’union des domestiques, la sérénité, la gaieté qui regnoient dans la maison, tout m’enchantoit. Pour peu qu’on n’ait ni le cœur ni l’esprit mal faits, on se trouve si bien auprès de la vertu heureuse ! le spectacle de ses plaisirs est si doux ! Je me levai cependant, mais pénétré du regret de quitter la charmante métairie.