Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/294

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marier, & contente de mon état, je ne pensois pas à en changer.

Pendant que Sara me parloit ainsi, j’étois fort ému, je croyois la reconnoître ; il me restoit cependant encore quelqu’incertitude, & j’attendois avec impatience qu’elle la dissipât. Nous passions, continua Sara, une très-petite partie des hivers à Londres. Nous venions d’y arriver lorsqu’un jeune Ecossois se présenta pour servir chez mon pere. Il étoit de la figure la plus agréable, & il avoit dans la physionomie un caractère de sensibilité & d’honnêteté dont il étoit difficile de n’être pas touché.

Les paysans sont, comme vous sçavez, plus instruits en Ecosse qu’ils ne le sont dans le reste de l’Europe, & ce jeune homme étoit un des mieux élevés de son pays. Il ne se distingua d’abord des autres domestiques que par un extrême attachement à ses devoirs ; nous vîmes bientôt qu’il se faisoit aimer de tous ses compagnons & qu’il leur inspiroit son zele pour nous ; mon pere se trouvoit mieux servi, & ses gens paroissoient plus gais & plus heureux.

L’Ecossois avoit toujours quelque livre à la main, dans les moments de liberté que lui lais-