Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/349

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vues aussi grandes ? N’enverrons-nous jamais des apôtres de la raison & des arts ? Serons-nous toujours conduits par un esprit mercantile & barbare, par une avarice insensée qui désole les deux tiers du globe, pour donner au reste quelques superfluités.

O peuples d’Europe ! les principes du droit naturel seront-ils toujours sans force parmi vous ? Vos Grecs, vos Romains ne les ont pas connus. Avant le Gouvernement civil de Locke, le livre de Burlamaqui & l’Esprit des Loix, vous les ignoriez encore ; que dis-je, dans ces livres mêmes sont-ils assez nettement posés sur la baze de l’intérêt, commun à toutes les nations & à tous les hommes ? Les Hobbes, les Machiavels & autres, n’ont-ils pas encore des partisans ? Dans quel païs de l’Europe les loix constitutives, criminelles, ecclésiastiques & civiles, sont-elles conformes à l’intérêt général & particulier ?

Peuples polis, peuples sçavants, prenez-y garde, vous n’aurez une morale, de bons gouvernements & des mœurs, que lorsque les principes du droit naturel seront connus de tous les hommes ; & que vous & vos législateurs, vous en ferez une application constante à votre conduite & à vos loix. C’est alors que vous serez meilleurs, plus