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Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/173

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grâce à l’armée des dévots qui veillent sur elles comme les croyants sur le tombeau de Mahomet, elles sont, bien heureusement pour nous et pour elles-mêmes, préservées de cette végétation parasite qui, sous le nom menteur de « traditions », vient peu à peu se coller aux flancs des autres ouvrages de théâtre et finit par les rendre méconnaissables ; à part certaines coupures, toujours fâcheuses, mais excusées par la longueur interminable de certains actes, on les exécute, la plupart du temps, telles que l’auteur les a écrites. Quant aux autres, justes cieux ! il y aurait de quoi ajouter un cercle à l’enfer du Dante, avec les supplices qui leur sont départis. On ne se contente plus, depuis longtemps, d’altérer la volonté de l’auteur, on en prend le contre-pied.

La suppression de la « voix de tête », chez les ténors, a fait prendre l’habitude de dire à plein gosier ce qui devrait se chuchoter à l’oreille ; et les déclarations d’amour sont devenues des hurlements de bête qu’on égorge. Malheur à la phrase qui se terminait sur une note du médium, au morceau qui s’éteignait dans un doux murmure : phrase et morceau sont condamnés, sans appel, à se terminer sur une note aiguë, avec ce charme spécial aux locomotives annonçant leur arrivée ; et pour que ce soit complet, il faut à toute force qu’un temps d’arrêt, ajouté sur l’avant-dernière note, permette de vociférer plus a l’aise. Quant aux mouvements, depuis que le vélocipède est entré dans