Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/20

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l’orchestre ; la lumière l’inonde et s’y joue comme dans les facettes d’un diamant.

En cela, Berlioz était guidé par un instinct mystérieux, et ses procédés échappent à l’analyse, par la raison qu’il n’en avait pas. Il l’avoue lui-même dans son Traité d’instrumentation, quand, après avoir décrit en détail tous les instruments, énuméré leurs ressources et leurs propriétés, il déclare que leur groupement est le secret du génie et qu’il est impossible de l’enseigner. Il allait trop loin ; le monde est plein de musiciens qui sans le moindre génie, par des procédés sûrs et commodes, écrivent fort bien pour l’orchestre. Ce Traité d’instrumentation est lui-même une œuvre hautement paradoxale. Il débute par un avant-propos de quelques lignes, sans rapport avec le sujet, où l’auteur s’élève contre les musiciens qui abusent des modulations et ont du goût pour les dissonances, comme certains animaux en ont pour les plantes piquantes, les arbustes épineux (que dirait-il donc aujourd’hui !). Puis il aborde l’étude des instruments de l’orchestre et mêle aux vérités les plus solides, aux conseils les plus précieux, des assertions étranges, celle-ci entre autres : « La clarinette, dit-il, est peu propre à l’idylle. » Il ne voulait voir en elle qu’une voix propre à l’expression des sentiments héroïques. Mais la clarinette, très héroïque en effet, est aussi très bucolique ; il n’y a qu’à se rappeler le parti qu’en a tiré Beethoven dans la Symphonie pastorale, pour en être convaincu. Le