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Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/205

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avec joie les souffrances que le Maître nous inflige pour le bien de notre âme. On subit avec reconnaissance les fatigues d’un long pèlerinage…

Renoncement, humilité, abandon de la volonté et de la raison, amour de la souffrance, c’est tout le mysticisme. Les mystiques chrétiens espéraient une compensation dans l’autre vie ; nos néo-mystiques pensent-ils revivre dans un paradis esthétique, où ils pourront adorer le Très-Saint-Drame-Musical en esprit et en vérité ? Ce n’est pas impossible ; rien n’est impossible.

Mais le mysticisme, source des voluptés ineffables, en si grand honneur au moyen âge, a été jugé ; on sait où il mène : à l’étiolement, au nihilisme, au néant. La logique a encore fait des siennes. On nous a tracé le tableau du Drame musical (les mots « Drame lyrique » ne répondent plus aux idées actuelles) tel qu’il devrait être pour atteindre à sa perfection. Un sujet essentiellement symbolique ; pas d’action : les personnage devant être des idées musicales personnifiées, non des êtres vivants et agissants. Et de déduction en déduction, on est arrivé à conclure que le drame idéal est une chimère irréalisable et qu’il ne faut plus écrire pour le théâtre !

Avec de pareilles exagérations, on finirait par faire regretter l’ancien opéra italien. C’était bien pauvre et bien plat, mais c’était au moins un cadre, sculpté et doré avec plus ou moins de goût, dans lequel apparaissaient de temps a autre de merveilleux