Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/228

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Dans ce chapitre, le Maître démontre et établit ceci : qu’entre l’Art et la Science, ces deux lumières du monde, il existe « une différence radicale : la Science est perfectible ; l’Art, non ».

On l’a quelque peu accusé d’avoir voulu écrire, dans ce livre, un plaidoyer déguisé pro domo suâ. S’il était vrai, l’occasion eût été belle pour lui, dont l’influence non seulement sur la littérature, mais sur l’Art tout entier, avait été si grande, pour lui qui avait renouvelé la poésie et la langue elle-même, les reforgeant à son usage, — d’insinuer, en s’efforçant d’établir une loi du progrès dans l’Art, que son œuvre était le summum de l’art moderne.

Il a fait tout le contraire.

L’Art, dit-il, est la région des égaux. La beauté de toute chose ici-bas, c’est de pouvoir se perfectionner ; la beauté de l’Art, c’est de ne pas être susceptible de perfectionnement.

L’Art marche à sa manière : il se déplace comme la Science ; mais ses créations successives, contenant de l’immuable, demeurent.

Homère n’avait que quatre vents pour ses tempêtes ; Virgile qui en a douze, Dante qui en a vingt-quatre, Milton qui en a trente-deux, ne les font pas plus belles.

On perd son temps quand on dit, Nescio quid majus nascitur « Iliade ». L’Art n’est sujet ni à diminution ni à grossissement.

Et il termine par ce mot profond :