Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/244

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harmonie par des accords arpégés ; le Récitatif obligé, accompagné par l’orchestre, entremêlé de ritournelles ; les airs, duos, trios, etc. ; de grands ensembles et de grands finales dans lesquels le compositeur se donnait libre carrière. Mozart a montré comment il était possible, même dans les airs, duos et autres morceaux, de se modeler exactement sur la situation et d’échapper à la monotonie des coupes régulières. Maintenant, comme on sait, la mode exige que des actes entiers soient coulés en bronze, d’un seul jet, sans airs ni récitatifs, sans « morceaux » d’aucune sorte ; le monde musical est plein de jeunes compositeurs qui s’évertuent à soulever cette massue d’Hercule. Il eût été peut-être plus sage de la laisser à celui qui l’a soulevée pour la première fois, avec une vigueur de lui seul connue ; mais comme on veut paraître aussi fort, que dis-je ? plus fort qu’Hercule lui-même, on masque son impuissance par une extravagance présentée sous les étiquettes de modernisme et de conviction. N’insistons pas. Comme je le disais en commençant, je craindrais de n’être pas bon juge en cette matière. Me sera-t-il permis de remarquer toutefois que le public paraît prendre peu de goût à ces exercices, et que s’il admire Hercule sans le comprendre toujours, de confiance, parce qu’il se sent d’instinct en présence d’une force indiscutable, il semble beaucoup plus froid à l’égard de ses imitateurs et successeurs ?