Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/62

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l’auteur de ces lignes en sait quelque chose, ayant été éconduit par Roqueplan, alors directeur de l’Opéra-Comique, pour avoir fait devant lui l’éloge des Noces de Figaro. Par la même raison, avant qu’il eût rien écrit pour le théâtre, Gounod avait déjà des adversaires : on prenait parti pour ou contre Sapho avant même qu’elle fût achevée. Aussi quelle soirée ! Le public s’enflammait à l’audition de cette musique dont le charme le captivait malgré lui ; dans les entr’notes, il se reprenait. Le finale du premier acte électrisa la salle, fut bissé avec transport ; l’enthousiasme calmé, les amateurs disaient d’un air entendu : « Ce n’est pas un finale, il n’y a pas de strette !  » Ils oubliaient que le superbe finale du troisième acte de Guillaume Tell n’en a pas non plus ; je me trompe, il en avait primitivement une : elle fut supprimée aux répétitions, comme aurait disparu celle du premier acte de Sapho si l’auteur eût inutilement ajouté quelque chose à la période qui en forme la foudroyante conclusion.

La presse fut houleuse. Il n’entre pas dans ses habitudes d’admettre d’emblée ce qui sort des routes battues ; néanmoins des critiques de premier ordre, tels que Berlioz, Adolphe Adam, avaient traité l’œuvre selon ses mérites. Peut-être le demi-succès du premier jour serait-il devenu un succès complet, si l’ouvrage avait pu continuer sa carrière ; mais Mme Viardot, parvenue au terme de son engagement, ne put jouer plus de quatre fois le