Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/70

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pourtant de réelles beautés. N’est-ce pas à cette époque que se rapportent des projets sur un Ivan Le Terrible, qui ne vinrent jamais à maturité ! La musique écrite à ce sujet fut utilisée plus tard dans d’autres ouvrages, et c’est ainsi que la marche bien connue de la Reine de Saba était destinée primitivement au cortège d’une Czarine, cortège agrémenté de conspirateurs rugissant dans l’ombre. J’entends encore Gounod chantant : « Meure ! meure ! meure la Czarine infidèle, — Et jetons sa dépouille au vent !  » — Ne vous hâtez pas de vous voiler la face. Gluck en a fait bien d’autres, quand il a éparpillé la musique d’Elena e Paride dans ses ouvrages ultérieurs !

Nous retrouvons le vrai Gounod, quatre années plus tard, en 1858, avec le Médecin malgré lui. Il avait été chargé, quelque temps auparavant, à propos d’une représentation extraordinaire donnée à l’Opéra, d’adapter à l’orchestre moderne la musique écrite par Lully pour le Bourgeois gentilhomme ; il est probable que ce travail lui aura suggéré le désir de se mesurer avec Molière. Il trouva de précieux collaborateurs dans M. Jules Barbier et Michel Carré. Ceux-ci, traités de haut par nos modernistes actuels, n’en avaient pas moins opéré une petite révolution, s’étant consacrés, après quelques succès littéraires, aux livrets d’opéra, montrant dans ce genre discrédité un souci de la langue et même un certain lyrisme qu’on n’était pas habitué à y rencontrer. Leur