Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 1.djvu/357

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titre particulier, mais qui n’est qu’un simple nom dont il se démit en arrivant à Paris. Le roi si content du duc de Noailles, et Mme de Maintenon tout à lui, voulurent que la grâce fût entière : la domerie fut donnée à l’abbé de Noailles et l’évêché de Châlons en même temps. C’étoit le plus jeune des frères de M. de Noailles et de M. de Châlons qui avoit au moins quinze ou dix-huit ans moins qu’eux.

Peu après mon retour, j’allai me réjouir avec M. de la Trappe de la solidité que le roi venoit de donner à son ouvrage. C’étoit une abbaye commendataire de onze mille ou douze mille livres de rente tout au plus en tout, et la moindre de celles dont il s’étoit [démis] en se retirant, sans penser encore à s’y faire moine, et beaucoup moins à y rétablir la vie ancienne de saint Bernard dans toute son austérité. Un commendataire qui lui auroit succédé n’auroit pas laissé de quoi vivre à ce grand nombre de pénitents qu’il y avoit rassemblés, et la régularité en auroit été fort hasardée. Il le représenta donc au roi par une lettre, et son désir de se voir un successeur régulier. Le roi non seulement le lui accorda, mais lui permit de le choisir, et lui promit qu’il n’y auroit point de commendataire tant que la régularité subsisteroit telle qu’il l’avoit établie ; et le pape y voulut bien entrer pour que cette grâce ne pût préjudicier à la nomination d’un commendataire, quand il plairoit au roi, même après trois ou un plus grand nombre de réguliers, parce que sans cette précaution trois abbés réguliers de suite remettent de droit l’abbaye en règle. M. de la Trappe nomma le prieur de sa maison qui étoit un des plus savants et des plus capables, mais qui ne vécut pas longtemps. Il se démit et parut encore plus grand en cet état qu’il n’avoit fait dans la réforme et le gouvernement de cet admirable monastère. Avant de quitter les saints, la mort de M. Nicole, qui arriva à Paris vers la

    la dignité abbatiale dans certains monastères. L’abbaye d’Aubrac, dont il est ici question, dépendait du diocèse de Rodez.