Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 2.djvu/247

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moi à la cheminée, puis nous sortîmes dans la chambre du roi où nous nous mîmes en tas à la cheminée. Là le duc de Rohan nous rendit sa conversation, où rien ne fut oublié. Il demanda justice sur sa femme de la princesse d’Harcourt, s’étendit sur les entreprises des Lorrains et l’impossibilité d’éviter des querelles continuelles ; il fit valoir le respect violé à Mme la duchesse de Bourgogne par la princesse d’Harcourt, et gardé par la duchesse de Rohan, expliqua bien le fait de Mme de Saint-Simon et de Mme d’Armagnac, et le noir et audacieux artifice des Lorrains pour se tirer d’affaire par ce faux change ; en un mot, parla avec beaucoup de force, d’esprit et de dignité. Le roi lui répondit qu’il l’avoit laissé dire pour en être encore mieux informé par lui ; qu’il l’étoit dès la veille par Mme la duchesse de Bourgogne, par la duchesse du Lude qui lui avoient dit les mêmes choses ; qu’il l’avoit été le soir par moi, et ce matin encore par M. le maréchal de Lorges, et qu’il nous en avoit parfaitement crus l’un et l’autre ; qu’il louoit fort le respect et la modération de Mme de Rohan, et trouvoit la princesse d’Harcourt fort impertinente. Il s’expliqua en termes durs sur les Lorrains, et par deux fois l’assura qu’il y mettroit ordre et qu’il seroit content. Je sus ensuite par mes amies du palais que Mme de Saint-Simon avoit été servie à souhait par Mme la duchesse de Bourgogne, et qu’il y avoit eu une dispute assez forte entre le roi et Mme de Maintenon, qui obtint à toute peine que la princesse d’Harcourt qui alloit toujours à Marly n’en fût pas exclue le lendemain. Mme d’Armagnac et ses fille et belle-fille qui s’étoient présentées, pas une n’y fut.

Toute cette journée se passa encore en mesures. Le lendemain, le roi alla à Marly. Mme la duchesse de Bourgogne n’y couchoit pas encore, mais elle y alloit tous les jours. Nous demeurâmes tard à Versailles pour la bien instruire par ce qui l’environnoit. Elle fit merveilles le lendemain. La princesse d’Harcourt essuya du roi une rude sortie ; et Mme de Maintenon lui lava fort la tête, en sorte que tout le voyage