Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 2.djvu/378

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publiquement pardon à la duchesse de Rohan-Chabot, à Versailles, chez Mme la chancelière, dans laquelle M. le Grand avoit voulu donner le change au roi sur Mme de Saint-Simon, à qui j’expliquai le fait, dont M. le Grand essuya pour lui et pour Mme d’Armagnac une petite réprimande, qui l’outra d’autant plus qu’il étoit fort accoutumé à tout le contraire. Mme d’Armagnac, faute de mieux, s’en prit à elle-même pour piquer son frère, et dégoisa sur sa propre naissance d’une manière fort fâcheuse. Ils ne s’étoient pas vus depuis. La réconciliation était d’autant plus difficile que le maréchal de Villeroy étoit personnellement ami intime de M. le Grand et du chevalier de Lorraine, et fort aussi de M. de Marsan, et qu’il y mettoit une dose de subordination fort à leur goût et fort peu de celui de la maréchale. Cette triste occasion fit entremettre des amis communs pour que, sans parler plus de ce qui s’étoit passé, le maréchal et la maréchale voulussent bien recevoir la visite de M. le Grand et de Mme d’Armagnac. Ils se raccommodèrent en effet, et furent aussi bien depuis que jamais ; mais pour les belles-sœurs, qui n’eurent en aucun temps que des bienséances réciproques, cela ne les réchauffa pas plus qu’à l’ordinaire.

Ils perdirent en même temps un fort honnête homme, brave et autrefois beau et bien fait, mais qui n’étoit pas fait pour être leur beau-frère. Il s’appeloit M. d’Hauterive. Son nom étoit Vignier, comme la mère de M. de Noyon-Tonnerre, et ces Vignier n’avoient aucune naissance. Celui-ci avoit servi avec réputation et avoit été cornette des chevau-légers de la reine mère.

La sœur du maréchal de Villeroy, aînée de Mme d’Armagnac, veuve en premières noces du dernier de la maison de Tournon, en secondes, du duc de Chaulnes, frère aîné de celui qui a été ambassadeur à Rome, etc., et gouverneur de Bretagne, puis de Guyenne, s’amouracha de ce M. d’Hauterive, et l’épousa publiquement malgré toute sa famille, qui ne l’a jamais voulu voir depuis.