Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/103

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au roi chaque sentence l’une après l’autre qui la signe avec un parafe pour avoir plus tôt fait, et de ce moment ces sentences deviennent des arrêts. Si le roi trouve quelque chose à redire à quelque sentence, et que l’explication qu’on lui en donne ne le satisfasse pas, il la laisse à un nouvel examen ou il la garde par-devers lui. Tout étant fini, et cela dure une heure et souvent davantage, le roi se lève, le conseil se met à genoux jusqu’à ce qu’il ait passé la porte, et s’en va comme il est venu, excepté le président seul, qui, au lieu de se mettre à genoux, suit le roi qui trouve sa cour dans une pièce voisine, y en ayant un vide entre-deux, et avec ce cortège passe une partie de son appartement ; dans une des pièces vers la moitié, il trouve un fauteuil, une table à côté, et vis-à-vis du fauteuil un tabouret. Là le roi s’arrête, sa cour continue de passer, puis les portes d’entrée et de sortie se ferment, et le roi dans son fauteuil reste seul avec le président assis sur ce tabouret ; là il revoit les sentences qu’il a retenues et les signe si bon lui semble, ou il les garde pour les faire examiner par qui il lui plaît, et le président lui rend un compte sommaire du grand détail public et particulier dont il est chargé. Cela dure moins d’une heure. Le roi ouvre luimême la porte pour retrouver sa cour qui l’attend et s’en aller chez lui, et le président retourne par l’autre par où il est entré, trouve un majordome qui l’accompagne à son carrosse et s’en va chez lui. Ces sentences retenues, ceux à qui le roi les renvoie lui en rendent compte avec leur avis. Il les envoie au président de Castille, et finalement l’arrêt se rend comme le roi le veut.

On voit par la qu’il est parfaitement absolu en toute affaire publique et particulière, et que les rois d’Espagne ont retenu l’effet, comme nos rois le droit, d’être les seuls juges de leurs sujets et de leur royaume. Ce n’est pas qu’il n’arrive bien aussi que le conseil de Castille, ou en corps ou le président seul, ne fasse des remontrances au roi sur des affaires ou publiques ou particulières auxquelles