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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/102

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celui où le chancelier de France préside aux conseillers d’État et aux maîtres des requêtes. C’est là où toutes les affaires domaniales et, particulières sont portées en dernier ressort, où les érections et les grandesses sont enregistrées et où les édits et les déclarations sont publiés, les traités de paix, les dons, les grâces, en un mot où passe tout ce qui est public, et on juge tout ce qui est litigieux. Tout s’y rapporte, rien ne s’y plaide ; avec tout ce pouvoir, ce conseil ne rend que des sentences. Il vient une fois la semaine dans une pièce tout au bout en entrant dans l’appartement du roi à jour et heure fixée le matin. Il est en corps, et il est reçu et conduit au bas de l’escalier du palais par le majordome de semaine ; dans cette pièce le fauteuil du roi est sous un dais sur une estrade et un tapis.

Vis-à-vis et aux deux côtés trois bancs de bois nu où se place le conseil. Le président a la première place à droite le plus près du roi, et à côté du président celui qui ce jour-là est chargé de rapporter les sentences de la semaine quoique rendues au conseil au rapport de différents conseillers. Ce rapporteur est nommé pour chaque affaire par le président, comme ici dans nos tribunaux, qui nomme aussi, tantôt l’un, tantôt l’autre, pour rapporter les sentences de la semaine au roi.

Le conseil placé, le roi arrive : sa cour et son capitaine des gardes même s’arrêtent à la porte en dehors de cette pièce. Dès que le roi y entre, tout le conseil se met à genoux, chacun devant sa place. Le roi s’assied dans son fauteuil et se couvre, et tout de suite ordonne au conseil de se lever, de s’asseoir et de se couvrir. Alors la porte se ferme, et le roi demeure seul avec ce conseil dont le président n’est distingué en rien pour cette cérémonie. Les sentences de la semaine sont là rapportées : le nom des parties, leurs prétentions, leurs raisons respectives et principales, et les motifs du jugement. Tout cela le plus courtement qu’il se peut, mais sans rien oublier d’important. Tout se rapporte de suite, après quoi le président et le rapporteur présentent