Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/177

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où elle se trouvoit avec le roi dans une occasion où il y alloit du tout pour elle, et avoit engagé la duchesse de Ventadour de voir Mme de Maintenon. Elle le fit ; Mme de Maintenon ne s’expliqua qu’en général, et dit seulement qu’elle irait chez Madame au sortir de son dîner, et voulut que Mme de Ventadour se trouvât chez Madame et fût en tiers pendant sa visite. C’étoit le dimanche, le lendemain du retour de Marly. Après les premiers compliments ce qui étoit là sortit, excepté Mme de Ventadour.

Alors Madame fit asseoir Mme de Maintenon, et il falloit pour cela qu’elle en sentît tout le besoin. Elle entra en matière sur l’indifférence avec laquelle le roi l’avoit traitée pendant toute sa maladie, et Mme de Maintenon la laissa dire tout ce qu’elle voulut ; puis lui répondit que le roi lui avoit ordonné de lui dire que leur perte commune effaçoit tout dans son cœur, pourvu que dans la suite il eût lieu d’être plus content d’elle qu’il n’avoit eu depuis quelque temps, non seulement sur ce qui regardoit ce qui s’étoit passé à l’égard de M. le duc de Chartres, mais sur d’autres choses encore plus intéressantes dont il n’avoit pas voulu parler, et qui étoient la vraie cause de l’indifférence qu’il avoit voulu lui témoigner pendant qu’elle avoit été malade. À ce mot, Madame, qui se croyoit bien assurée, se récrie, proteste, qu’excepté le fait de son fils elle n’a jamais rien dit ni fait qui pût déplaire, et enfile des plaintes et des justifications. Comme elle y insistoit le plus, Mme de Maintenon tire une lettre de sa poche et là lui montre, en lui demandant si elle en connoissoit l’écriture. C’étoit une lettre de sa main à sa tante la duchesse d’Hanovre, à qui elle écrivoit tous les ordinaires, où après des nouvelles de cour elle lui disoit en propres termes : qu’on ne savoit plus que dire du commerce du roi et de Mme de Maintenon, si c’étoit mariage ou concubinage ; et de là tomboit sur les affaires du dehors et sur celles du dedans, et s’étendoit sur la misère du royaume qu’elle disoit ne s’en pouvoir relever. La poste l’avoit ouverte, comme elle les ouvroit