Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/74

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que l’or demeura au profit du roi, qui ne fut pas médiocre, et on en peut juger par le volume de huit grandes caisses de grandes et grosses billes solides d’or ; et le chocolat qui les revêtoit demeura à ceux qui avoient découvert la galanterie.

Le Danemark reconnut le roi d’Espagne. Ce prince fut rencontré à Bordeaux par le connétable de Castille, venant ambassadeur extraordinaire pour remercier le roi de l’acceptation du testament. Il s’appeloit don Joseph- Fernandez de Velasco, duc de Frias. Il fut reçu au Bourg-la-Reine par le baron de Breteuil, introducteur des ambassadeurs, qui est un honneur qui de ce règne n’avoit été fait à aucun autre qu’au marquis de La Fuente, qui après l’affaire du maréchal d’Estrades et du baron de Vatteville à Londres pour la préséance, vint ambassadeur extraordinaire pour en faire excuse et déclarer en présence de tous les autres ambassadeurs, en audience publique, que l’Espagne ni ses ambassadeurs ne disputeroient jamais la préséance au roi ni à ses ambassadeurs et la lui céderoient partout. Le connétable de Castille parut avec une grande splendeur, et fut extrêmement accueilli et festoyé. Le roi le distingua extrêmement et lui fit un présent très considérable à son départ. Il ne fut pas longtemps en France, et il y parut fort magnifique, fort galant et fort poli.

À Bayonne le roi trouva le marquis de Castanaga, dix ou douze autres personnes de considération, et plus de quatre mille Espagnols accourus pour le voir. Harcourt y étoit arrivé deux jours auparavant, de Madrid, au-devant de lui. Le roi se mit dans un fauteuil à la porte de son cabinet, ayant derrière lui M. de Beauvilliers, entre MM. de Noailles et d’Harcourt. Le duc d’Ossone étoit plus en avant, pour marquer au roi ceux qui étant gentilshommes pouvoient avoir l’honneur de lui baiser la main. Tous, à l’espagnole, se mirent à genoux en se présentant ’devant lui. Il vit toute cette foule les uns après les autres, et les satisfit tous ainsi au