Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/218

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Ath pris par les ennemis. — Séparation des armées en Flandre. — Le roi, amusé sur le voyage de Fontainebleau, ne le fait point cette année. — Kercado, maréchal de camp, tué. — Talon, Polastron, Rose, colonels, morts en Italie, et le prince de Maubec, colonel de cavalerie.


On sut bientôt le changement qui regardoit le commandement de l’armée d’Italie sous M. le duc d’Orléans. Villars n’en voulut point tâter : il ne s’accommoda point de prendre l’ordre de M. de Vendôme, et aussi peu d’être sous un jeune prince. Il étoit parvenu aux richesses et aux plus grands honneurs. Sans balancer, il leur remit le marché à la main, et répondit tout net que le roi étoit le maître de lui ôter le commandement de l’armée du Rhin, le maître de l’employer et de ne l’employer pas, mais que d’aller en Italie il ne pouvoit s’y résoudre, et qu’il supplioit le roi de l’en dispenser. Un autre que l’heureux Villars eût été perdu. De lui ou des conjonctures, tout fut trouvé bon. Le même courrier lui fut renvoyé avec ordre de demeurer à la tête de son armée, et un autre à Marsin portant, dès qu’il y seroit arrivé (et qu’on ne savoit où prendre par les chemins), de s’en aller en Italie par la Suisse, au lieu de Villars. Le roi exigea de M. le duc d’Orléans la même parole à l’égard de celui-ci qu’il lui avoit fait donner pour l’autre. Il l’entretint longtemps à Marly, le mercredi matin, 30 juin. M. le duc d’Orléans prit congé et s’en alla à Paris, d’où il partit le lendemain avec vingt-huit chevaux et cinq chaises pour arriver en trois jours à Lyon, et pousser de là, sans s’arrêter, en Italie.

Mmes de Savoie sortirent de bonne heure de Turin et se retirèrent à Coni. M. de Savoie reçut assez mal les offres de sûreté pour tous les lieux où elles voudroient aller, que La Feuillade lui envoya faire de la part du roi. Il répondit sèchement qu’elles étoient bien où elles étoient. Lui-même quitta Turin à la fin de juin. Il en laissa le commandement au comte de Thun, qui ne s’en acquitta que trop bien, et