Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 6.djvu/394

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la honte de toute cette action, et s’en attirer gloire et honneur, tandis que, complaisant une seule fois à l’opposition de l’attaque du convoi, pour l’insulter mieux, il s’étoit rendu si absolu toutes les autres, et l’avoit si audacieusement montré au jeune prince parlant publiquement à lui. On voit la même conduite, la même cadence en ce secours ; et quand par ses lenteurs et ses détours, en fermant la bouche à tout le monde, il a tant fait que de laisser prendre et accommoder en plein loisir à Marlborough un poste inattaquable, et qu’il juge très bien qui ne s’attaquera pas, il ferme la bouche à tous après avoir promis la liberté de délibérer, crie, écrit, corne bataille et victoire, et prépare à Mgr le duc de Bourgogne tout l’affront d’avoir manqué le secours.

Ce prince, qui n’avoit pas oublié les propos d’Audenarde, tint aussi pour attaquer les ennemis. Ce courrier tant attendu fut dépêché pour recevoir les ordres du roi sur le parti auquel on devoit s’arrêter, tandis que les dispositions s’achevoient, et que Saint-Hilaire se hâtoit de joindre. Mais ce ne fut pas tout ce qu’il rapporta. On apprit que le jour qu’on étoit arrivé à Orchies, M. de Vendôme avoit fait passer à Pont-à-Marck quelques troupes de l’autre côté de ce ruisseau pour reconnoître les ennemis qui, le ruisseau entre eux et notre armée, l’avoient côtoyé le plus près qu’ils avoient pu, et que ce détachement les ayant trouvés éloignés, parce que ce jour-là ils s’étoient mis dans le poste que je viens d’expliquer, M. de Vendôme envoya prier Mgr le duc de Bourgogne de pousser à Pont-à-Marck où il étoit, et où il lui avoit proposé de faire passer l’armée ; que tous les officiers généraux trouvèrent dangereux de se commettre à une action demi-passés, ce qui pouvoit arriver si le duc de Marlborough étoit averti à temps et se reployoit sur nous ; que Mgr le duc de Bourgogne ne se déclara pas assez nettement, quoique Cheladet, lieutenant général, criât qu’il falloit rompre son épée et n’en porter jamais si on ne passoit