Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/116

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non plus que sur le voyage de Torcy, qu’il y alla furtivement faire quelque temps après. J’en userai de même sur le voyage que firent l’année suivante le maréchal d’Huxelles et l’abbé de Polignac, tôt après cardinal, à Gertruydemberg ; et pareillement sur tout ce qui amena et fit la paix d’Utrecht. Torcy, dont la plume et la mémoire ne sont pas moins justes, bonnes, exactes, que les lumières et la capacité, a écrit toutes ces trois négociations. Il a bien voulu me communiquer son manuscrit lui-même ; je le trouvai si curieux et si important que je le copiai moi-même ; il feroit en trois morceaux mis ici en leur temps de trop longues parenthèses [1]. Ils sont plus agréables et plus instructifs à voir tous trois de suite, et c’est ainsi qu’ils se trouveront dans les Pièces [2].

Il suffira donc ici de faire connoître Rouillé. Il étoit président en la cour des aides, et frère de Rouillé qui, de procureur général de la chambre des comptes, devint directeur des finances, puis conseiller d’État, dont la brutalité et les débauches, à travers beaucoup d’érudition et de quelque esprit, firent tant parler de lui, surtout dans la régence de M. le duc d’Orléans. Celui-ci, qui étoit le cadet, avoit un esprit délicat et poli, aussi sobre et mesuré que son aîné l’étoit peu, et il avoit passé une partie de sa vie en diverses négociations, et en dernier lieu ambassadeur en Portugal. On avoit toujours été content de lui, on verra qu’on ne le fut pas moins malgré le triste succès de son voyage en Hollande.

Je ne puis mieux placer une double anecdote que fort peu de gens ont sue, et qui ne précéda que de fort peu les dernières choses que je viens d’écrire, mais que j’ai réservée

  1. Voy. la seconde, la troisième et la quatrième partie des Mémoires de Torcy. Elles contiennent probablement les trois morceaux dont parle Saint-Simon.
  2. Voir aux Pièces toute la négociation de Rouillé à Bodgrave, de Torcy et de lui à la Haye, et du maréchal d’Huxelles et de l’abbé de Polignac à Gertruydemberg, et sur la paix d’Utrecht. (Note de Saint-Simon.)