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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/141

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CHAPITRE IX.


Mort de M. le Prince ; son caractère. — Mlle de Tours chassée de chez Mme la princesse de Conti, fille de M. le Prince, par ordre du roi, obtenu par le P. Tellier. — Ducs et princes et leurs femmes font leurs visites sur la mort de M. le Prince en manteaux et en mantes, par ordre du roi, et l’exécutent d’une manière ridicule. — Eau bénite de M. le Prince. — Époque de l’entrée des domestiques des princes du sang dans le carrosse du roi. — Suite de cette usurpation. — Autre entreprise. — Autre nouveauté. — Grand dégoût au duc de Bouillon. — Le corps de M. le Prince conduit à Valery par M. de Fréjus, depuis cardinal de Fleury, et reçu par l’archevêque de Sens, en présence de M. le Duc et de ses seuls domestiques. — Service à Notre-Dame en présence des cours supérieures. — Ducs parents invités. — Cardinal de Noailles officiant, se retire à la sacristie après l’évangile, parce que la parole fut adressée à M. le Duc à l’oraison funèbre. — Méchanceté atroce de M. le Duc sur moi absent. — Le roi ni les fils de France ne visitent Mme la princesse de Conti ni Mme la Princesse qu’à Versailles. — Progression des biens de la maison de Condé. — M. le Duc ne change point de nom.


M. le Prince, qui depuis plus de deux ans ne paraissoit plus à la cour, mourut à Paris un peu après minuit, la nuit du dimanche de Pâques au lundi, dernier mars et 1er avril, en sa soixante-sixième année.

C’étoit un petit homme très-mince et très-maigre, dont le visage d’assez petite mine ne laissoit pas d’imposer par le feu et l’audace de ses yeux, en un composé des plus rares qui se soit guère rencontré. Personne n’a eu plus d’esprit et de toutes sortes d’esprit, ni rarement tant de savoir en presque tous les genres, et pour la plupart à fond, jusqu’aux arts et aux mécaniques, avec un goût exquis et