Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/273

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logé jusqu’alors dans celui de son beau-père, dont le roi disposa ; et la cour, non seulement à demeure, comme j’y avois toujours été, mais même à fréquenter, est intolérable et impossible sans un logement que je n’étois pas alors à portée d’obtenir. Depuis le Marly où éclata le départ de Torcy pour la Hollande, j’en avois été éconduit : ainsi la main du roi s’appesantissoit peu à peu en bagatelles, peut-être en attendant occasion de pis ; d’aller en Guyenne sans que rien fût terminé entre Montrevel et moi, il n’y avoit pas moyen d’y penser ; je pris donc le parti d’aller à la Ferté, résolu d’y passer une et plusieurs années, et de ne revoir la cour que par moments et pas même tous les ans, s’il m’étoit possible sans manquer au tribut sec et pur du devoir le plus littéral.

Mon assiduité auprès de Chamillart à l’Étang, aux Bruyères, à Mont-l’Évêque, à Paris, avoit déjà déplu. Je partis un mois après qu’il fut allé chercher des terres pour s’éloigner de Paris. Ses filles vinrent s’établir et l’attendre à la Ferté, où il revint de ses tournées, et où je le reçus avec des fêtes et des amusements que je ne lui aurois pas donnés dans sa faveur et dans sa place, mais dont je n’eus pas de scrupule, parce qu’il n’y avoit plus de cour à lui faire, ni rien à attendre de lui : aussi y fut-il vivement sensible. Il fut assez longtemps chez moi ; il y laissa ses filles, et s’en alla à Paris pour finir plusieurs affaires et le marché de la terre de Courcelles, dans le pays du Maine, qu’il acheta à la fin. Je demeurai chez moi dans ma résolution première, où toutefois je ne laissai pas d’être informé de ce qu’il se passoit. Reprenons maintenant le affaires devant et depuis mon départ de la cour, et qui le retardèrent de beaucoup, et après lequel je soupirois avec un dépit ardent.

L’expression me manque pour ce que je veux faire entendre. La cour, par ces grands changements d’état et de fortune de Vendôme et de Chamillart, étoit plus que jamais divisée. Parler de cabales, ce seroit peut-être trop dire, et