Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/5

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voulut d’autant plus tôt se fixer à quelque chose, que les ennemis faisoient divers mouvements, et n’avoient que vingt bataillons devant cette citadelle pour en faire le siège. Cette raison de décision, et celle d’éclaircir plusieurs choses qui s’étoient passées depuis que Chamillart étoit revenu de Flandre, firent prendre le parti subit de l’y renvoyer. Il partit donc le mardi 30 octobre, à quatre heures du matin, de Versailles, pour aller coucher à Cambrai ; et Chamlay, si expert dans la connoissance des moindres lieux et des plus petits ruisseaux de la Flandre, partit à midi du même jour pour l’y suivre. Si la cour fut surprise de voir si près à près disparaître Chamillart, l’armée ne le fut pas moins de le voir arriver à Tournai. Il y porta les grâces répandues sur ceux qui venoient de sortir si glorieusement de Lille. Surville, sorti de la citadelle de Lille avec un coup de mousquet fort considérable, eut dix mille livres de pension. Lée, qui étoit aussi à Douai pour être trépané d’un autre coup de mousquet, eut l’expectative, les marques et la pension de grand-croix de Saint-Louis, en attendant la première vacante. Rannes, Ravignan, Coetquen, Permangle furent faits maréchaux de camp ; Maillebois dès avant la fin du siège, Belle-Ile (tous deux maintenant maréchaux de France, et le premier duc héréditaire ; après bien de diverses et d’étranges fortunes), Martinville, Tourrotte et Sourzy furent faits brigadiers, et quelques autres.

La tranchée fut ouverte devant la citadelle de Lille la nuit du 29 au 30 octobre. Ils attaquèrent l’avant-chemin couvert le 7 novembre, dont ils furent repoussés avec assez de perte, et le 10 Chamillart arriva, et rendit compte le soir même de son voyage au roi chez Mme de Maintenon ; ainsi son voyage fut de douze jours, dont il en passa huit à l’armée, pendant lesquels son fils travailla avec le roi, comme il avoit fait pendant son précédent voyage de Flandre. En attendant, les ennemis désoloient l’Artois, et le prince d’Auvergne fortifioit la Bassée. Cheladet y marcha avec trente escadrons, et à la