Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/53

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demandoit, que c’étoit une compagnie très étendue composée de bien des sortes de gens et d’esprit dont on ne pouvoit répondre, qu’il ne falloit point mettre au désespoir, et se mettre ainsi dans un hasard dont lui-même ne lui pouvoit répondre, et qu’un mauvais coup étoit bientôt fait et n’étoit pas sans exemple. Maréchal pâlit à ce récit que lui fit le roi, et cacha le mieux qu’il put le désordre où il en tomba.

Cette considération unique fit rappeler les jésuites par Henri IV, et les fit combler de biens. La pyramide de Jean Châtel [1] les mettoit au désespoir ; ils trouvèrent, sous Louis XIV, Fourcy, prévôt des marchands, capable de les écouter, et en état de l’oser par le crédit de Boucherat, chancelier de France, son beau-père, qui, appuyé du roi, contint le parlement. Fourcy fit abattre la pyramide sans en laisser la moindre trace ; son fils, sortant du collège, en eut l’abbaye de Saint-Vandrille de plus de trente-six mille livres à l’étonnement publie, et en jouit encore. C’est même un fort honnête homme et considéré, qui ne s’est pas soucié d’être évêque.

Le roi n’étoit pas supérieur à Henri IV ; il n’eut garde d’oublier le document du P. de La Chaise, et de se hasarder à la vengeance de sa compagnie en choisissant hors d’elle un confesseur. Il vouloit vivre et vivre en sûreté. Il chargea les ducs de Chevreuse et de Beauvilliers d’aller à Paris, de s’informer, avec toutes précautions qu’ils pourroient y apporter, de qui d’entre les jésuites il pourroit prendre pour confesseur.

M. de Chartres et le curé de Saint-Sulpice ne regardoient pas ce choix avec indifférence ; ils voulurent y influer. Toutefois

  1. Cette pyramide avait été élevée sur l’emplacement de la maison du père de Jean Châtel, qu’on avait rasée après l’attentat commis par son fils contre Henri IV le 27 décembre 1594. Voy. de Thou, Hist. universelle, liv. CXI, chap. xviii, et Mémoires de Condé, t. VI, supplément, part. III, p. 132 et suiv.