Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/76

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la survivance pendant sa première ambassade en Hollande, que son neveu eut ensuite. D’Avaux et son frère étoient neveux paternels du président de Mesmes, et de M. d’Avaux, surintendant des finances, célèbre par sa captivité et le nombre de ses importantes ambassades. Tous deux étoient aînés du père du président de Mesmes et de d’Avaux duquel je parle ici. D’Avaux l’oncle mourut sans alliance en 1650 ; et son frère aîné, mort la même année, ne laissa que Mme de Vivonne et une religieuse naine à la Visitation de Chaillot, sœur de mère de la duchesse de Créqui, qui a été dame d’honneur de la reine.

D’Avaux le neveu avoit été conseiller au parlement, maître des requêtes, enfin conseiller d’État. C’étoit un fort bel homme et bien fait, galant aussi, et qui avoit de l’honneur, fort l’esprit du grand monde, de la grâce, de la noblesse, et beaucoup de politesse. Il alla d’abord ambassadeur à Venise, ensuite plénipotentiaire à Nimègue, où, en grand courtisan qu’il étoit, il s’attacha à Croissy, qui l’étoit avec lui et frère de Colbert, lequel le fit secrétaire d’État des affaires étrangères à la disgrâce de Pomponne. D’Avaux, quelque temps après la paix de Nimègue, fut ambassadeur en Hollande. Le nom qu’il portoit lui servit fort pour tous ces emplois, et le persuada qu’il en étoit aussi capable que son oncle. Il faut pourtant avouer qu’il en avoit des talents, de l’adresse, de l’insinuation, de la douceur, et qu’il fut toujours partout parfaitement averti. Il s’acquit en Hollande une amitié et une considération si générale et jusque des peuples, et sut si bien se ménager avec le prince d’Orange, parmi les ordres positifs et réitérés qu’il avoit de chercher à lui faire de la peine en tout jusque dans les choses inutiles, qu’il auroit fait tout ce qu’il auroit voulu pour le roi, sans cette aversion que le prince d’Orange ne put jamais vaincre, et dont j’ai expliqué en son lieu la funeste origine, qui le jeta dans le parti opposé à la France, de laquelle il devint enfin le plus grand ennemi.