Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 9.djvu/64

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qu’il n’avoit jamais eu dessein de se séparer de nous, et nous le fit dire, en forme. Peu de jours après, je le trouvai chez Chamillart, que je voyois régulièrement tous les jours que j’étois à Paris. La Feuillade m’y demanda un entretien tête à tête. Il s’entortilla dans un long éclaircissement, dans des protestations inutiles, dans des compliments personnels sans fin.

Je pris tout cela pour bon ; la fin fut que la peur le tint joint à nous, mais le premier payement fait, il n’en voulut plus ouïr parler, et que nous ne le vîmes ni aux assemblées, ni aux sollicitations, ni en aucunes des démarches sur ce procès. Avec cette conduite il s’attira ceux que d’effet il abandonnoit et qui ne s’en contraignirent pas dans le monde, lequel leur fit écho sur un homme peu estimé et aimé pour avoir abusé de sa faveur, et en être tombé par ses fautes avec une grande brèche à l’État. Il n’apaisa pas l’ancienne haine de d’Antin, bien loin de se concilier son secours, pour n’oser prendre son parti, et il n’y eut pas jusqu’à l’entremetteur Lignerac qui fut trouvé fort ridicule.

Les ducs, démis, destitués de qualité pour agir, ne purent que demeurer dans l’inaction ; les pairs ecclésiastiques furent réservés pour être juges, quoique les trois ducs nous eussent offert leur jonction, et M. de Metz n’étoit pas encore en situation de rien faire. Le duc de Noailles ne répondit jamais un mot là-dessus aux maréchaux de Boufflers et d’Harcourt qui lui en écrivirent plus d’une fois. Le cardinal son oncle avoit alors bien d’autres affaires à démêler. Le duc d’Uzès en usa tout autrement, il manda franchement à d’Antin qu’étant son beau-frère et alors en Languedoc, il se tairoit sous prétexte d’ignorance, mais que s’il s’avisoit de le faire assigner comme il prétendoit faire à tous pour les obliger à une déclaration expresse, il feroit la sienne contre lui, sur quoi d’Antin n’osa passer outre avec lui. M. d’Elbœuf, au-dessus ou au-dessous de tous procédés, en