Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 10.djvu/376

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

exacte, et il remit Saint-Germer près Beauvois, la seule abbaye qu’il eût, pour n’être pas en pluralité de bénéfices. On la donna à l’abbé Begon, depuis évêque de Toul, parent proche des Colbert, qui fut choisi pour être le conducteur du jeune prélat, sous le nom de grand vicaire. M. de Beauvilliers ni le roi ne vécurent pas assez pour voir combien il y avoit eu de sagesse et de raison dans les craintes et les refus du duc de Beauvilliers de faire son frère évêque si promptement, que ses désordres éclatants et persévérants firent enfin renfermer dans un monastère pour le reste de ses jours, presque gardé à vue, et forcément démis de son évêché pour éviter la dégradation et la déposition juridique.

Mme la duchesse de Berry accoucha, sur les quatre heures du matin du dimanche 26 mars, d’un prince qui fut appelé duc d’Alençon. Il vint à sept mois, et la flatterie fut telle que presque toute la cour se trouva née ou avoir des enfants à ce terme. La joie en fut courte ; il donna plusieurs alarmes par sa délicatesse, et il mourut le samedi 25 avril à minuit. Le roi nomma le duc de Saint-Aignan et le marquis de Pompadour pour accompagner la corps à Saint-Denis. Il partit de Versailles le lundi 27 avril après dîner, avec les gardes, les pages, et les carrosses de M. le duc de Berry ; l’évêque de Séez portant le cœur, eut pour cette raison la première place, et M. de Saint-Aignan la seconde, au derrière du carrosse, comme duc ; M. et Mme de Pompadour au devant, elle comme gouvernante ; et le petit corps posé entre eux. Lorsqu’ils eurent passé les cours, et un peu avancé dans l’avenue, M. de Saint-Aignan força par politesse Mme de Pompadour de changer de place avec lui. De Saint-Denis ils furent porter le cœur au Val-de-Grâce. M. [le duc] et Mme la duchesse de Berry furent extrêmement touchés.

L’électeur de Bavière qui étoit toujours à Suresne, et qui s’y amusoit à chasser dans la forêt de Saint-Germain et ailleurs, à des retours de chasse chez lui, à un gros jeu, et à donner des fêtes champêtres à l’occasion de la paix, qui