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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/178

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ce qu’il pourra, mais au moins on ne m’en tourmentera plus. »

Des paroles aussi expressives de la violence extrême soufferte, et du combat long et opiniâtre avant de se rendre, de dépit et de guerre lasse, aussi évidentes, aussi étrangement signalées, veulent des preuves aussi claires, aussi précises qu’elles le sont elles-mêmes, et tout de suite les voici. Je tiens celles que le roi dit au premier président et au procureur général du premier qui n’avoit eu garde de les oublier ; il est vrai que ce ne fut que longtemps après, car il faut être exact dans ce que l’on rapporte. Je fus entre deux ans brouillé avec le premier président jusqu’aux plus grands éclats ; la durée en fut longue. Il fit tant de choses pour se raccommoder avec moi après le mariage de sa fille avec le duc de Lorges, sur quoi je me portai aux plus grandes extrémités, qu’enfin le raccommodement se fit, et si bien que je devins avec lui à portée de tout ; et que sa sœur, Mme de Fontenilles, femme d’une piété et d’un esprit rare, devint une de nos plus intimes amies, de Mme de Saint-Simon et de moi, sans que cela se soit démenti un moment depuis. C’est alors que le premier président me raconta mot pour mot ce que le roi leur dit en leur remettant le testament, que le procureur général me raconta précisément et de même, tous deux chacun à part et en temps différents [1], tel exactement que je le viens d’écrire. Il n’est pas temps de parler de cette brouillerie, moins encore du raccommodement ; mais il m’a paru nécessaire de faire ici cette explication.

À l’égard de ce que le roi dit à la reine d’Angleterre, qui

  1. Cette phrase : que le procureur général me raconta précisément et de même, tous deux chacun à part et en temps différents, a été biffée par Saint-Simon qui a ajouté la note suivante : « Je me suis ici trompé de nom et de mémoire, Fleury n’étoit pas lors procureur général, et ne sut que par le premier président et par le procureur général, qui étoit d’Aguesseau, ce que le roi leur avoit dit. Je fais cette note pour rendre raison de la rature de ce que j’écrivis avant hier. »