Aller au contenu

Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

des justes, ayant conservé toute sa tête jusqu’à la fin. Il avoit près de soixante-six ans, environ trois ans moins que le duc de Chevreuse, étant né le 24 octobre 1648 d’une maison fort ancienne et très noblement alliée, surtout en remontant.

Il étoit fils de M. de Saint-Aignan qui, avec de l’honneur et de la valeur, étoit tout romanesque en galanterie, en belles-lettres, en faits d’armes. Il avoit été capitaine des gardes de Gaston, et tout à la fin de 1649, acheta du duc de Liancourt la charge de premier gentilhomme de la chambre du roi, lors duc à brevet. Il commanda ensuite en Berry contre le parti de M. le Prince, lors prisonnier, puis [fut] lieutenant général de l’armée destinée contre MM. de Bouillon et de Marsillac en Guyenne. Il eut le gouvernement de Touraine à la mort du marquis d’Aumont, et le crédit de le vendre fort cher à Dangeau encore jeune, lorsqu’à la disgrâce de M. et de Mme de Navailles, il s’accommoda avec lui du gouvernement du Havre de Grâce en 1664. Il fut chevalier de l’ordre à la promotion de 1661 et duc et pair en 1663, de cette étrange fournée des quatorze [1]. Il fut chef et juge du camp des derniers carrousels du roi, et mourut à Paris 16 juin 1687. Il avoit épousé une Servien, parente du surintendant des finances, qu’il perdit en 1679. Au bout de l’an, il se remaria à une femme de chambre de sa femme qui y étoit entrée d’abord pour avoir soin de ses chiens. Elle fut si modeste et lui si honteux que le roi le pressa souvent et toujours inutilement de lui faire prendre son tabouret. Elle vécut toujours fort retirée et avec tant de vertus, qu’elle se fit respecter toute sa vie qui fut longue. Du premier mariage, le comte de Seri et le chevalier de Saint-Aignan qui fut tué au duel de MM. de La Frette, et l’aîné mourut à vingt-six ans survivancier de premier gentilhomme de la chambre et distingué à la guerre, deux fils

  1. Voir. t. Ier, p. 449, note de la fin du volume.