Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/287

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Ces parlements subsistèrent dans cette forme jusqu’à Charles VI. Sous ce malheureux règne, les factions d’Orléans et de Bourgogne les composoient à leur gré, suivant qu’elles avoient le dessus pendant les intervalles que le roi n’étoit pas en état de les nommer. Le désordre qui en résulta fit que, dans les bons intervalles de ce prince, il fut jugé à propos de laisser à vie ces commissions qui n’étoient que pour chaque assemblée. Ainsi ces commissions se tournèrent peu à peu en offices ; et les assemblées venant à durer longtemps, il fallut opter entre l’épée et l’écritoire, et les nobles qui étoient choisis pour en être avec les légistes, n’en ayant plus le loisir par les guerres qui les occupoient, quittèrent presque tous cette fonction, en sorte qu’il n’en demeura qu’un très petit nombre, qui ont fait les familles les plus distinguées du parlement de Paris, dont il ne reste plus. Tout ce récit est plutôt étranglé que suffisamment exposé, mais la vérité historique et prouvée s’y trouve religieusement conservée. Le mémoire sur les renonciations dont il a été parlé plus haut, quoique fort abrégé aussi, et qui se trouvera parmi les Pièces, explique d’une façon plus complète et plus satisfaisante ce qui vient d’être exposé jusqu’ici et qui le sera dans la suite.

Il reste un monument bien remarquable de l’état des légistes séants aux pieds des pairs et des hauts barons sur le marchepied de leurs bancs, depuis même que les parlements sont devenus ce qu’on les voit aujourd’hui. Ils n’avoient qu’une chambre pour leur assemblée, qu’on appelle la grand’chambre depuis qu’il y en a eu d’enquêtes, requêtes, tournelle, etc., qui sont nées de cette unique chambre. On y voit encore les hauts sièges qui étoient le banc des pairs et des hauts barons, et des bas sièges qui étoient le marchepied de ce banc sur lequel les légistes s’asseyoient ; d’un marchepied ils en ont enfin fait un banc tel qu’on le voit aujourd’hui, et de ce banc après ils sont montés aux hauts sièges. Voilà le commencement des usurpations que l’art