Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/294

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

roi et du royaume, desquels il est partie principale, et dont l’augmentation du temporel est regardée comme importante au roi et à l’État, qui, à cet effet, supplie instamment le pape, etc., et qui juge le choix d’un évêque pour cette Église d’une conséquence si importante pour lui et pour son royaume, et nomme cet évêché-pairie, par deux fois apanage [1].

Quoi de plus exprès pour prouver l’extrême disparité de puissance terrienne et de dignité personnelle d’une part ; et de l’autre la plus entière identité, quant à la dignité de la pairie et à tout ce qu’elle renferme, entre celle de Laon et ces grandes, anciennes et ces premières ; entre un sujet encore inconnu et ces anciens et premiers pairs de France ; conséquemment la futilité de se frapper de disparité quant à tout ce qui est de la pairie, fondée sur tout ce qui lui est entièrement étranger, comme l’extraction, la puissance terrienne, la souveraineté ; et, pour s’en mieux convaincre encore, s’il est possible, il faut ajouter qu’en ces temps reculés, c’est-à-dire les 19 et 26 février 1410, le procureur général du roi fit proposer, en la cause de l’archevêque et archidiacre de Reims, suivant l’ancienne comparaison de saint Louis, que les « pairs furent créés pour soutenir la couronne, comme les électeurs pour soutenir l’empire, par quoi on ne doit souffrir qu’un pair soit excommunié, parce que l’on a à converser avec lui pour les conseils du roi, qui le devroit nourrir s’il n’avoit de quoi vivre, si est-ce la différence grande entre lesdits pairs et les électeurs de l’empire qui font l’empereur, et lesdits pairs ne font le roi, lequel vient de lignée et plus proche degré. »

Il seroit difficile de déclarer le pouvoir législatif et constitutif des pairs avec plus de clarté et d’énergie que le fait

  1. Il n’est pas question d’apanage dans la lettre de Philippe le Bel, mais de parage (paragium). Le mot parage indiquait l’égalité entre les nobles ; de là l’expression de paritas employée comme synonyme de paragium dans cette même lettre.