elle gouverna sans lacune, sans obstacle, sans nuage le plus léger, plus de trente ans entiers, et même trente-deux ; c’est l’incomparable spectacle qu’il s’agit de se retracer, et qui a été celui de toute l’Europe.
CHAPITRE II.
C’étoit une femme de beaucoup d’esprit, que les meilleures compagnies, où elle avoit d’abord été soufferte, et dont bientôt elle fit le plaisir, avoient fort polie et ornée de la science du monde, et que la galanterie avoit achevé de tourner au plus agréable. Ses divers états l’avoient rendue flatteuse, insinuante, complaisante, cherchant toujours à plaire. Le besoin de l’intrigue, toutes celles qu’elle avoit vues, en plus d’un genre, et de beaucoup desquelles elle avoit été, tant pour elle-même que pour en servir d’autres, l’y avoient formée, et lui en avoient donné le goût, l’habitude et toutes les adresses. Une grâce incomparable à tout, un air d’aisance, et toutefois de retenue et de respect,